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L’aventure africaine VI – Banane & riz sont tes amis | Jay WorldMan

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Ma coquette petite chambrée tavétaienne.

Ma nuit à l’hôtel s’est finie comme-ci comme-ça. Après que j’ai tant bien que mal aéré ma chambre, Dieu seul sait pourquoi j’ai voulu aller aux toilettes (en fait moi aussi je sais)(mais je vous dirai pas). J’en suis revenu plutôt tôt que tard, pâle comme la mort, ayant été attaqué par des insectes géants tandis qu’un porc, un crapaud ou un je-ne-sais-quoi (géant, lui aussi) me menaçait de son cri rauque à travers les planches vermoulues de la cabine. Elles n’avaient déjà pas été faciles à trouver ces toilettes, mais alors à utiliser ! Elles étaient cachées au fond de la petite cour, derrière ce grand container en plastique gris autour duquel était étendu du linge (je le sais : j’avais ma mini-lampe-torche-remontable-porte-clef sur moi). Un muret sur la gauche et les cabines sur la droite formaient un étroit couloir au sol douteux. Je m’y engageais pour découvrir l’intérieur des cabines : de toutes petites salles vides aux milieux desquelles était disposée… une chaise. Gné ? Une chaise en bois à structure de fer, une chaise d’école. Mais comment ça marche leur bordel ? En observant le sol de plus près je me suis aperçu qu’il était légèrement incliné et menait vers une rigole sur le bord de cette micro-pièce. Il n’y avait ni eau ni papier bien sûr. Comment se servir de ce truc là ?! Je me suis mis à imaginer les théories les plus délirantes pour finalement me résoudre à chercher de l’aide auprès de la tenancière. Elle me parla sans détour :

  • –          Ca c’est les douches, les toilettes c’est le couloir d’en face.

Effectivement : le couloir d’en face était équipé de cabines similaires, elles-mêmes équipées des trous les plus puants que j’ai jamais-vus-de-mes-yeux-vus (« Mets tes lunettes et écoute comme ça sent bon » disait Jean-Michel).

  • –          Et pour se… ?

Je n’eus pas besoin de finir ma phrase, la tenancière et moi nous comprenions parfaitement, c’est comme si elle lisait directement dans mes pensées : il y avait entre nous cette connivence qu’on ne rencontre qu’une fois dans une vie. Aussi se saisit-elle d’un seau qui trainait par là, vida l’eau de douze ans d’âge qui se trouvait au fond et où flottait un cadavre de blatte géante pour la remplir au container et me la tendre enfin et afin que je m’en arrose le fondement une fois le moment venu. Or il arriva que ce moment n’arriva jamais, parce que c’était juste pas possible ; parce que malgré mon goût pour l’aventure et toutes sortes de dons exceptionnels qu’il serait fastidieux d’énumérer ici je ne suis pas parvenu à trouver la force et la concentration nécessaires pour aller au bout de la mission que je m’étais fixée : soit que les trois centimètres qui espaçaient chacune des planches de la porte aient été trois centimètres de trop ; soit qu’il fut trop difficile d’éviter tout contact entre mes vêtements et ce qu’on peu à peine qualifier de sol, tout en visant au bon endroit, non sans se garantir d’éclaboussures difficilement délébiles et non que la perspective de me rincer le cul au jus de blatte n’ait été follement aventuresque. L’opération serait donc remise à plus tard grâce au truchement d’une alimentation judicieuse : banane et riz. J’ai de la bouteille comme aventurier maintenant, et ça se sent !

La cour, à l'extérieur de la chambre, et le lieu du drame: au fond... mais de jour c'est beaucoup moins flippant, forcément...

De retour dans ma cellule puis dans mon lit je considère ma double moustiquaire. La grande trouée de l’hôtel et la mienne, trop courte, d’où je décide de m’asperger en plus les jambes d’anti-moustique pour la peau. Et là, dans le noir, paf : j’ai pas vu de quel côté était orienté le spray et j’ai tout pris dans l’œil gauche. Ca brûle putain ! Et ça mouille aussi parce qu’en voulant rincer « abondamment » j’en ai foutu partout. J’ai quand même réussi à m’endormir dans mon lit trempé jusqu’à ce qu’au beau milieu de la nuit, quelqu’un frappe à ma porte. Je me suis figé de trouille. La personne frappe et refrappe vigoureusement en criant « Soldat ! Soldat ! ». Je vérifie l’heure : deux heures du mat’ ! C’est quoi ce bordel ?! Je m’empare de ma cuillère-fourchette-couteau-de-chez-Nature-&-Découverte et j’ouvre la porte au périsque de ma vie. Horreur : il y a dans la petite cour un black de couleur noir… or les criminels sont toujours noirs d’après Eric Zemmour !!!

  • –          Vous êtes soldat ? me demande-t-il en me voyant apparaître (j’ai caché ma cuillère derrière la porte pour qu’il ne se doute de rien)
  • –          Non, je suis endormi.
  • –          Ah pardon.

J’ai pas compris. Mais j’étais trop fatigué pour approfondir. Je suis allé me recoucher jusqu’à ce qu’un coq me réveille quelques deux heures plus tard, coq très certainement géant comme toutes les bestioles du coin, si j’en crois ses beuglements.

Alors je suis allé prendre une douche, vu que maintenant je sais où c’est. Et les Kenyans que j’y ai croisés ont ri de moi parce que j’avais oublié de mettre des tongs : quel manque d’hygiène.

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